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"Transformation de la fonction publique" : les deux chambres rendent une copie commune

L'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus, ce jeudi 4 juillet, à établir une version conjointe du projet de loi réformant la fonction publique. Encadrement du droit de grève, apprentissage, handicap, statut des directeurs généraux de collectivités, fonctionnaires privés d'emploi… sur de nombreuses mesures intéressant la fonction publique territoriale, le point de vue des sénateurs a prévalu.

L'Assemblée nationale et le Sénat ont annoncé, ce 4 juillet, avoir trouvé un accord sur le projet de loi de "transformation de la fonction publique". La réunion à laquelle des élus des deux assemblées ont pris part dans la matinée a été une simple formalité, comme l'a révélé un peu plus tard la députée Émilie Chalas, rapporteure du texte. Au cours des jours précédant le rendez-vous, les parlementaires avaient pris soin de confronter leurs divergences et de dégager un compromis. Le texte consensuel ainsi mis au point a été salué dans les rangs des deux chambres. La présidente de la commission des lois de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet, a évoqué des "négociations fructueuses", tandis que son homologue au Sénat, Philippe Bas s'est dit "très satisfait". "Beaucoup d'éléments du travail des sénateurs ont été consacrés", a-t-il affirmé à l'AFP. De son côté, le secrétaire d'État chargé de la fonction publique, Olivier Dussopt, s'est félicité sur Twitter que "tous les objectifs du gouvernement (soient) atteints".
Émilie Chalas a elle aussi affiché une grande satisfaction lors d'une conférence de presse organisée, en milieu de journée, par le groupe LREM de l'Assemblée nationale. La rapporteure a salué "l'esprit de dialogue et d'écoute particulièrement constructif" qui a guidé les travaux de la commission mixte paritaire. Elle a relevé que les députés ont certes réalisé "plusieurs concessions". Mais ce sont des "compromis positifs", nullement "des sacrifices", a-t-elle dit. Le texte adopté respecte "la philosophie initiale du projet de loi, tout en améliorant de nombreuses dispositions longuement discutées lors de l'examen parlementaire", a estimé la députée. "Fluidité, garanties, transparence et reconnaissance du travail fait sont les piliers du travail que nous avons mené", a-t-elle résumé. En jugeant que le résultat est "bien loin des caricatures que l'on pouvait entendre ces derniers mois".

Une charte pour les DGS

S'il faudra attendre la mise en ligne (prévue jeudi soir ou vendredi) du texte adopté par la commission mixte paritaire pour avoir une idée très précise des arbitrages rendus par les parlementaires, la communication faite jeudi matin, tant du côté de l'Assemblée nationale que du Sénat, permet de lever le voile sur le sort de plusieurs mesures qui intéressent les collectivités territoriales et leurs agents.
Ainsi, les dispositions prévoyant la définition par un décret des missions des directeurs généraux de service des collectivités territoriales, qui avaient été introduites en commission à l'Assemblée nationale, ont été rayées d'un trait. "Nous partageons avec les sénateurs l'avis qu'il serait intéressant qu'une charte soit établie", a indiqué Émilie Chalas. Avec ses homologues du Sénat, Catherine Di Folco et Loïc Hervé, elle adressera un courrier aux acteurs concernés, afin de les inciter à bâtir ce projet. Une initiative que n'ont pas attendue les responsables du syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales et de l'Association des maires de France, puisqu'ils se sont rencontrés en début de semaine.

Apprentissage : 50% du coût à la charge du CNFPT

Sur de nombreux autres articles du texte, c'est le point de vue de la Chambre Haute qui a prévalu. C'est le cas pour la gestion des fonctionnaires momentanément privés d'emploi. Les agents en question, au nombre d'environ 440 actuellement, vont être incités à retrouver plus rapidement une affectation. Par ailleurs, le droit de grève des agents territoriaux sera bien encadré, pour empêcher notamment "les grèves perlées". Une grève devra faire l'objet d'un préavis auprès de l'employeur et devra être effectuée "sur l'ensemble de la plage de service", a révélé Émilie Chalas.
S'agissant de l'apprentissage dans les collectivités territoriales, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) participera à son financement à 50%, ce qui représentera pour la structure une dépense supplémentaire de 38 millions d'euros. Elle devra trouver les ressources nécessaires "dans son budget propre", celui-ci n'ayant pas fait l'objet d'une "extension". Les 50 % restants du coût seront pris en charge par les employeurs publics locaux.
Chère au Sénat, l'obligation pour le gouvernement de présenter une "feuille de route" des décisions qui pourront avoir un impact pour les collectivités territoriales, figurera bien dans la version finale du projet de loi. De même que plusieurs dispositions imaginées par les sénateurs pour mieux accompagner les agents en situation de handicap. Il s'agit notamment de la généralisation des référents handicap et de la possibilité de titularisation directe des apprentis handicapés. Le principe d'un bonus/malus appliqué aux contributions des employeurs pour le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique ne semble en revanche pas avoir été retenue.

"Réforme imposée aux agents"

On notera encore que les parlementaires ont retouché plusieurs dispositions. À l'instar de celle qui accorde une habilitation au gouvernement pour réformer par ordonnance la haute fonction publique. "Nous avons abouti à une rédaction à la fois plus précise que celle du texte initial et qui laisse suffisamment de latitude à la mission confiée à Frédéric Thiriez pour explorer les différents scénarios possibles", s'est réjouie sur ce point la rapporteure à l'Assemblée nationale.
Même s'il a suscité un large accord, le texte établi par la commission mixte paritaire n'a pas fait l'unanimité. Les sénateurs socialistes ont par exemple voté contre. "Cette réforme au forceps, imposée aux agents, dégradera durablement les conditions de travail de celles et ceux qui ont choisi de s’engager pour le service public", a déclaré sur Twitter le sénateur Jérôme Durain.
Les conclusions de la commission mixte paritaire doivent encore être approuvées par les deux assemblées. Le vote à l'Assemblée est prévu le 17 juillet et celui au Sénat le 24 juillet. Le projet de loi sera alors définitivement adopté.